Une orpheline, une maison aux pignons verts et de l’imagination

« Les âmes sœurs ne sont pas aussi rares que je le pensais. C’est formidable d’en trouver autant dans le monde. » (p. 200)

J’aime beaucoup la maison d’édition Toussaint Louverture, je la suis donc activement sur les réseaux et dernièrement ils ont publié une magnifique édition d’Anne de Green Gables écrit par Lucy Maud Montgomery. Je me suis jetée sur la pré-commande et j’ai lu le roman juste après l’avoir reçu. Je connaissais déjà l’adaptation de Netflix Anne with an e et j’avais hâte de découvrir l’œuvre d’origine. Et ce fut un véritable plaisir de lire ce petit bijou, surtout pendant l’automne ! J’aimerais vous partager ici les éléments qui m’ont particulièrement touchée dans cet ouvrage.

On y découvre les Cuthbert, Marilla et son frère Mathews, qui décident d’adopter un orphelin pour les aider à la ferme. Suite à une erreur, c’est une petite fille aux cheveux roux et à la langue bien pendue, prénommée Anne « avec un e » qui arrive à la place du garçon attendu. Les Cuthbert décident tout de même de l’accueillir et le lecteur va suivre à partir de là les aventures de la petite Anne et de sa nouvelle famille.

J’ai adoré rencontrer à nouveau les personnages et les redécouvrir, tous autant touchant que dans la série. Dans ce premier tome, on suit l’enfance d’Anne à partir de son arrivée chez les Cuthbert jusqu’à ses seize ans. Chaque chapitre raconte une histoire différente de la vie d’Anne, tout en se suivant et le lecteur est pleinement imprégné dans son quotidien et ses aventures. Anne est très attachante, pleine de rêves et d’enthousiasme, elle apprend de ses erreurs et ressent pleinement les choses. On suit ses envolées lyriques avec plaisir et amusement :

« Oh ! Ces cerisiers ! Cette île est l’endroit le plus fleuri que j’aie jamais vu. Je l’aime déjà et je suis heureuse à l’idée d’y vivre. J’ai toujours entendu dire que l’Ile-du-Prince-Édouard était l’un des plus beaux endroits du monde, et j’ai souvent imaginé y vivre, mais je ne m’attendais vraiment pas à ce que ça arrive. Quel délice quand votre rêve devient réalité, n’est-ce pas ? » (p. 23)

Anne accorde une grande place à l’imagination et à la beauté du monde. Le lecteur va retrouver ces thématiques tout au long du roman, bien qu’il va y avoir une évolution au fur et à mesure qu’Anne grandit et gagne en maturité. Anne et Lucy Maud Montgomery ont d’ailleurs certains points communs portant sur l’importance de l’imaginaire et du rêve. En effet, l’autrice canadienne perd sa mère alors qu’elle a seulement deux ans. Elle va ensuite passer une partie de son enfance chez ses grand-parents et sera plongée dans une assez grande solitude où l’écriture aura déjà une place primordiale. Elle se crée même des amies imaginaires, à l’instar d’Anne. 

« Vous savez, dit Anne à Marilla sur le ton de la confidence, j’ai décidé de profiter de ce trajet. Si la vie m’a appris quelque chose, c’est qu’on peut presque toujours profiter de tout si l’on est fermement décidé à le faire. L’important, c’est d’être ferme. Pendant cette promenade, je ne veux pas penser à l’orphelinat. Je ne penserai qu’à la promenade. » (p. 49)

« Mais nous sommes riches, dit Anne avec ardeur. Nous avons seize ans, nous somme heureuses comme des reines, et puis nous avons toutes de l’imagination, plus ou moins. Regardez la mer, les filles – tout en argent, en ombres et en esquisses de choses encore inconnues. Nous ne profiterions pas plus de sa beauté si nous avions des millions de dollars et des rivières de diamants. » (p. 339)

On s’y attache de plus en plus au personnage d’Anne et c’est également le cas de son entourage. Si le rapport de Mathews avec sa protégée est tout de suite complice et touchant, j’ai adoré voir l’évolution des sentiments de Marilla envers Anne. Certains passages sont drôles et d’autres réellement émouvants. C’est à travers cette relation que je me suis également attachée à Marilla. 

« Il lui sembla presque que ses pensées secrètes, ses critiques silencieuses, avaient soudainement pris corps – une forme palpable et accusatrice – en la personne de ce petit bout d’humanité négligé à la langue bien pendue. » (p. 107)

« Marilla la regardait avec une tendresse qu’elle n’aurait jamais accepté de dévoiler à la lumière d’un jour plus clair que ce doux mélange d’ombres. La leçon d’un amour qui se manifeste sans peine en paroles comme en regards était une leçon que Marilla n’apprendrait plus. » (p. 297)

Je trouve que de manière générale, les personnages dans ce roman sont très bien dosés, ils font de belles choses, mais font également des erreurs. Ils n’arrêtent jamais d’apprendre et d’évoluer à travers les pages. Certains personnages sont parfois irritants ou énervants, mais sans mauvaises intentions. L’autrice dépeint des personnalités réalistes, pleines de nuances, qui vivent leur vie dans la petite ville d’Avonlea.

Tous ces personnages évoluent autour d’Anne et j’ai évidemment beaucoup apprécié Diana, sa grande amie. Rachel Lynde m’a fait rire plus d’une fois et la relation de rivalité qu’Anne entretient avec Gilbert est très amusante également. 

Un élément qui a beaucoup résonné en moi est la façon dont sont dépeintes certaines amitiés et relations d’Anne. Elle parle souvent d’âme soeurs pour évoquer ses grandes amitiés et ses coups de coeurs pour certaines personnes, comme avec Diana – sa grande amie, Mathew ou encore la tante de Diana, Madame Barry.

Anne de Green Gables est un roman initiatique où les thématiques de l’enfance et du passage à l’âge adulte occupent une place assez importante. On y voit une enfance balancée entre des épisodes tristes et la joie de vivre, en passant par des anecdotes amusantes. Tout cela écrit d’une belle plume, légère, mais pleine de poésie et qui, souvent, sonne juste. 

J’ai passé un excellent moment de lecture avec ce classique de la littérature canadienne qui m’a tour à tour émue et fait rire. J’aimerais encore vous partager une citation qui, je trouve, résume parfaitement l’atmosphère de l’ouvrage :

« Je donnerai à la vie ce qu’elle a de meilleur, et je suis sûre qu’en retour, elle me donnera ce qu’elle a de meilleur elle aussi. […], l’avenir semblait s’étirer devant moi comme un chemin tout tracé. Je pouvais voir sur des kilomètres et des kilomètres. Maintenant, il y a un tournant. Je ne sais pas ce qui s’y cache après, mais j’aime à croire que le meilleur nous attend. » (p. 377)

Je conseille cette petite perle à toute personne voulant une lecture qui fait du bien et pleine de bon sens.

L&C

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